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Crise du marché immobilier : résidentiel, le choix de la prudence ?

par Antoine Tranchimand

Crise du marché immobilier : résidentiel, le choix de la prudence ?

Qu’ils soient économiques ou généralistes, tous les médias ne cessent de le répéter, l’immobilier français est en crise.

Du point de vue des volumes, cette affirmation n’est pas contestable. Les notaires annoncent un recul du nombre de transactions de l’ordre de 12,8% sur un an, et même une baisse de 41% sur les ventes d’immobilier neuf. En outre l’ACPR, organe de contrôle du monde bancaire, a publié des statistiques indiquant une baisse de 42% du volume de crédit immobilier accordé par les banques. Avec des indicateurs à 2 chiffres, on peut en effet parler de crise.

Sur le plan des prix, la situation est bien différente. A fin août, la baisse des prix sur un an serait de l’ordre de 0,4% au niveau national selon la base de données MeilleursAgents. Evidemment, cette quasi stabilité cache des situations très disparates, d’un point de vue géographique mais surtout fonctionnel. Les marchés de l’immobilier commercial (bureaux et commerces) et de l’immobilier résidentiel ne sont pas forcément corrélés.

Entre le mois de mars le 15 septembre, 13 SCPI (Sociétés Civiles de Placement Immobilier) grandes détentrices d’immobilier commercial, ont décoté le prix de leurs parts de -7% jusqu’à -17%. S’il existe plus de 200 SCPI commercialisées en France, ce mouvement baissier n’a rien d’anecdotique puisque les SCPI concernées font parties des plus importantes, ces 13 sociétés représentant à elles seules 25% d’un marché de 93 milliards d’Euros.

En d’autres termes, les baisses annoncées par ces SCPI ont engendré une destruction de valeur de 3,10 milliards d’Euros en 6 mois pour les porteurs de parts.

Réglementairement, la valeur cumulée des parts d’une SCPI ne peut s’écarter de plus de 10% de la valeur d’expertise de son portefeuille. Il est probable que le mouvement baissier s’accentue puisque d’autres gérants ont annoncé être entrés dans une phase de révision de leurs valeurs sur la fin de l’année.

Le marché de l’immobilier commercial souffre depuis plusieurs années des changements sociétaux que constituent le développement du télétravail pour les bureaux et la part de marché croissante de la vente en ligne pour les commerces. Il est à craindre que le ralentissement économique observé sur cette fin d’année continue de détériorer la rentabilité de l’immobilier commercial, entrainant une hausse de la vacance et in-fine une nouvelle baisse des valeurs.

La situation de l’immobilier résidentiel n’est pas non plus idyllique. Après 20 années de croissance quasiment ininterrompue, hormis en 2008/2009, les prix de l’immobilier résidentiel semblent désormais stagner, voire baisser dans certaines régions ou localités.

Les métropoles ayant connu la plus forte croissance enregistrent maintenant un premier repli. Selon les chiffres du 1er septembre, Paris baisse sur un an de 4,5%, Bordeaux de 7,3% et Lyon de 8,4% (source MeilleursAgents – Les Echos).

Cette réalité sur les 3 métropoles baissières ne doit néanmoins pas masquer une situation contrastée.

Tout d’abord la baisse des prix n’est pas nationale, loin de là. Par exemple, alors que Paris intramuros baisse, l’Ile-de-France continue de progresser de 1% sur un an. De même, les prix de certaines grandes villes montent comme à Toulouse (+2%), Marseille (+2,5%) ou Nice (+6,2%).

D’autre part, l’impact du DPE est considérable puisqu’une « bonne » étiquette (A,B ou C) engendre une plus-value de 3% à 16% et une « mauvaise » étiquette (E, F ou G) entraine une moins-value de 2% à 11% (source : calcul ADNOV / Notaires de France). Ces écarts, souvent supérieurs aux baisses de prix constatées, doivent amener à relativiser l’effet du marché et à prendre en compte les caractéristiques intrinsèques des biens considérés.

L’immobilier résidentiel est donc certes en crise du point de vue des volumes mais à ce stade, il faut tempérer les titres sensationnels des médias. Les prix ne sont pas « en chute libre » comme on peut le lire parfois. On peut même noter la bonne tenue des prix de l’immobilier résidentiel dans un environnement économique compliqué.

Enfin, la très forte hausse des taux d’intérêts a déclassé des ménages susceptibles d’acquérir leur résidence principale et les contraint à s’orienter vers la location. Ainsi dans les grandes villes, la demande locative a augmenté entre 30% et 50% sur un an (sources Beanstock /RMC), alors même que la tension locative y était déjà forte. Le risque de vacance sur le résidentiel n’a jamais été aussi faible.

Corrélativement, les loyers sont orientés à la hausse par l’effet conjugué de cet accroissement de la demande et de l’inflation. A tel point que le gouvernement a plafonné par décret l’IRL (Indice de Révision des Loyers), indice obligatoire pour l’immobilier d’habitation, à 3,50% par an. S’il peut sembler faible, l’application par un propriétaire bailleur de cet indice pendant 3 ans représente quand même près de 11% d’accroissement de sa rentabilité.

Malgré des rendements attractifs, l’immobilier commercial est entré dans une période de turbulences liées à profondes mutations sociétales dont les conséquences sont encore inconnues. Dans cet environnement économique incertain, il reste que le besoin de logement ne risque pas de se tarir. Dès lors l’investissement en immobilier résidentiel est probablement le choix de la raison.

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