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La Carazette des marchés – Mars 2023

par Yohann Derbyshire

La Carazette des marchés – Mars 2023

La Carazette des marchés

Mars 2023

Les rachats d’actions : un nouveau moyen de récompenser les actionnaires en Europe

Les rachats d’actions sont de plus en plus populaires parmi les entreprises européennes cherchant à récompenser leurs actionnaires. Cette stratégie offre une flexibilité accrue par rapport aux dividendes, mais nécessite une analyse minutieuse des moyens de financement utilisés pour ces opérations.

  • Un actionnaire peut être récompensé de son investissement par la société de trois manières :
    en réalisant de la plus-value avec la hausse du cours de l’action en fonction de la valorisation perçue par le marché
    en recevant des dividendes par la société
    en effectuant des plus-values grâce à un rachat d’actions

Pour un investisseur international à la recherche de rendement, l’Europe a toujours été une terre promise. En effet, le vieux continent offre à ses actionnaires des niveaux de dividende beaucoup plus élevés qu’aux États-Unis (environ 3% pour l’EuroStoxx 50 vs 1.5% pour le S&P 500 américain).

Très répandu dans les pays anglo-saxons, les rachats d’actions sont de plus en plus offerts par les entreprises européennes à leurs actionnaires. Historiquement, les sociétés américaines ont préféré leurs offrir des rachats d’actions, car le traitement fiscal des résidents américains n’est pas le même : les dividendes sont taxés comme des revenus
alors que les plus-value ne le sont pas.

Après une année 2022 où la plupart des actions ont vu leur valorisations baisser, certaines entreprises ont profité de cette conjoncture complexe pour racheter leurs actions à bon compte. Le rachat d’actions représente plus d’un tiers des montants reversés par les entreprises aux actionnaires cette année en Europe. Entre 2021 à 2022, le montant d’actions rachetées a donc doublé atteignant ainsi les 161 milliards d’euros.

Les rachats d’actions sont souvent considérés comme une bonne nouvelle pour l’actionnaire. La société en réalisant cette opération aura moins d’actions en circulation pour le même bénéfice généré, augmentant ainsi le bénéfice moyen d’une action. Les bénéfices futurs par actions augmenteront donc mécaniquement grâce à la réduction du nombre d’actions en circulation.
Il faut cependant analyser au cas par cas les moyens par lesquels ces sociétés rachètent leurs actions. Si ce rachat est financé par de la dette, l’intérêt peut être limité pour les actionnaires car la qualité de crédit de la société peut se voir réduite par l’opération.

Les sociétés réalisant ce genre d’opération sont généralement des sociétés matures qui considèrent qu’il vaut mieux réduire leur coût du capital (coût de cotation, coût des dividendes) que garder cet argent pour financer leur croissance future. Les rachats d’actions peuvent également aider les sociétés à attirer de nouveaux investisseurs en démontrant leur santé financière et leur sous-valorisation.

Enfin, les rachats d’actions offrent aux entreprises une plus grande flexibilité que la mise en place d’une politique de dividendes, car l’annonce d’un rachat d’actions est un événement unique, contrairement à une politique de distribution de dividendes qui doit être maintenue dans le temps.


Saison des résultats : les bénéfices des grandes entreprises reflètent-ils les craintes de récession ?

La saison des résultats du dernier trimestre de 2022 prendra fin prochainement. Après une année 2022 désastreuse pour la plupart des actions qui ont vu leur niveau de valorisation fondre, il est l’heure de rendre compte : ralentissement ou non?

Les craintes de récession étaient bien présentes et les analystes avaient peu à peu commencé à réduire leurs attentes. Il en ressort que les entreprises ont présenté des résultats solides, même s’ils sont en décélération de 2.8% sur 1 an. Aux États-Unis, à l’heure où nous écrivons ces lignes, 405 entreprises sur les 500 du S&P 500 ont publié leurs résultats. Sur cet échantillon, 67% dépassait les attentes des analystes (comparable à moyen long terme de 66%). En revanche, même si ce chiffre semble normal, concernant les meilleurs élèves, même s’ils dépassent les attentes, leur surperformance était en moyenne de 1.6% vs les attentes (à comparer avec une moyenne long terme de 4.1%).

Mais il faut regarder dans les détails pour bien comprendre la dynamique de ces résultats.
Le secteur de l’énergie a publié des résultats records et sauve l’image globale que nous évoquions ci-dessus. En effet, en enlevant le secteur de l’énergie, la croissance bénéficiaire sur 1 an pour le quatrième trimestre passe de -2.8% à -7% (la croissance des résultats de l’énergie est de 60%).
Les secteurs défensifs comme la santé et les consommations de base s’en sortent bien malgré le contexte inflationniste, avec des baisses de résultat contenues de l’ordre de -2.5% et -1.9%.
En revanche, certains secteurs plus cycliques comme la consommation discrétionnaire* (automobile par exemple) présentent un fort recul de -17%.

Les craintes récessionnistes depuis le début de l’année ont diminué ce qui a permis aux analystes de réduire l’estimation des baisses futures des publications du premier et deuxième trimestre 2023. Ils attendent désormais -4% au 1er trimestre et -3% au deuxième trimestre avant d’atteindre une embellie au 3ème et 4ème trimestres (3.6% et 10.1%).
Ces chiffres auront l’occasion d’être revus en fonction de la trajectoire de l’inflation et des données économiques.

*Définition consommation discrétionnaire : La consommation discrétionnaire, par opposition à la consommation de base, est l’ensemble des biens et services considérés comme non essentiels. Elle est parfois nommée consommation cyclique et s’oppose à la consommation défensive. Étant des consommations non essentielles, les consommations discrétionnaires sont les premières à être réduites quand le pouvoir d’achat baisse. Exemple : Automobile, Luxe, Tourisme (Wikipedia)


Le tourisme retrouve son souffle en 2022, mais les défis persistent en 2023

La reprise du tourisme est portée par la réouverture des aéroports dans le monde entier et à la forte demande de voyages. Cette industrie doit encore faire face à des défis tels que la pénurie de main-d’œuvre et l’inflation en 2023.

La fin progressive des restrictions en 2022 et la réouverture de la Chine en ce début d’année 2023 pourraient bien être la douce lumière au bout du tunnel pour le secteur du tourisme.

Le tourisme a particulièrement été touché pendant la crise de la Covid de 2020 et la longue année transitoire de 2021.
En 2022, la réouverture globalisée des aéroports et l’épargne accumulée durant cette période ont permis un retour important du secteur.
Selon l’INSEE, le secteur du tourisme a vu son chiffre d’affaires global en hausse de 14% par rapport à 2019. De plus, la fréquentation de l’hexagone par les touristes étrangers a retrouvé des couleurs. Ils ont par ailleurs dépensé 7% de plus sur leur lieu de vacances qu’en 2019. Le tourisme domestique a également sa part dans ses bons résultats grâce à davantage de nuits passées. L’augmentation constatée peut être attribuée à deux facteurs : l’effet de volume (envie de voyager) et l’effet de prix (capacité à augmenter les prix dans un contexte de réouverture de l’économie).

Cette reprise du secteur s’illustre par le retour du transport aérien. Il a connu un fort succès une fois la grande partie des restrictions sanitaires levées. Le taux de réservation correspond à 90% de l’année 2019. Cet afflux de voyageurs soudain a provoqué notamment chez certaines sociétés des difficultés à répondre à cette demande, provoquant parfois des pénuries temporaires et des hausses de tarifs. L’inflation, les grèves et le climat géopolitique actuel participent à l’augmentation de 22% des billets d’avions.

Les profits en hausse sur le 4e trimestre 2022 des entreprises du secteur du tourisme confirment bien le ressenti de la période estivale. Airbus, en lien avec l’activité aéronautique en hausse, s’est vu confier un nombre important de nouvelles commandes qui devrait permettre d’atteindre des records de production d’ici 2027. Côté hébergement de tourisme, la plateforme Airbnb est devenue profitable pour la première fois, enregistrant une hausse de 40% de son chiffre d’affaires et efface ainsi les mauvaises années de 2020 et 2021. L’offre du prestataire s’agrandit avec 1 million de nouveaux logements disponibles en 2022. Dans la même lignée d’Airbnb, Accor enregistre un chiffre d’affaires deux fois supérieur à 2021, aidé par une hausse des réservations et des prix par nuitées.

Pour autant, cette reprise du secteur s’accompagne aussi d’un environnement qui reste complexe :

  • Problématique de recrutement et inflation salariale
  • Une demande et l’épargne des ménages se normalisent : l’épargne constituée pendant les mois de confinement est aujourd’hui consommée. Le secteur fait donc face à des effets de base difficiles à battre
  • Réveil de la Chine : sur le plan positif, les chinois peuvent désormais voyager mais les longs mois de confinement ont modifié les habitudes de voyage qui sont désormais plus domestiques. Il faudra attendre pour voir si un retour à la normale pourra être observé.

Les bonnes publications donnent un élan de croissance bienvenue aux professionnelles du secteur. Pour faire perdurer la reprise, ces derniers devront s’attaquer aux problématiques évoquées.

Auteurs des articles : Patrick Brosset, Paul Garnier et Yohann Derbyshire.

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